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Sébastien-Philippe LAURENS Journaliste et Historien

Sébastien-Philippe LAURENS Journaliste et Historien

Comme le disait Winston Churchill : “ La vérité est incontestable, la malveillance peut l’attaquer, l’ignorance peut s’en moquer, mais à la fin, elle demeure." ---------------------------- Et je rajouterai que la curiosité permet de la faire émerger. ------ Journaliste, Historien et Géo-politologue, passionné par l’Histoire, la Culture, et tant de choses… ------------------------------ Toute une passion, ce site est là pour le plaisir du partage... au plus grand nombre humblement par un regard sur le monde sans juger ou orienter... ---------------------------------------------------------- Alors venez à la découverte, soyez curieux... Et bonne lecture...


Lettres de Fusillés : Henri Fertet, Résistant de 16 ans, "Adieu, la mort m'appelle"

Publié par Sébastien-Philippe LAURENS sur 18 Octobre 2018, 15:17pm

Catégories : #Histoire, #CeJourLà, #France, #Seconde Guerre Mondiale, #Résistance, #Esprit de défense, #Compagnon de la Libération, #Henri Fertet, #Lettres Fusillées, #@BlogLSP, #Lettre Henri Fertet

Lettre Henri Fertet

Lettre Henri Fertet

 

Henri Fertet, lycéen du Doubs, élève intelligent et appliqué, passionné d'histoire et d'archéologie, s’est lui aussi illustré par un engagement précoce dans la résistance en 1942. Jugé par un tribunal de guerre allemand et fusillé, à l’âge de 16 ans, le 26 septembre 1943 avec 15 de ses camarades. 

Son engagement, il l’explique dans sa dernière lettre qui laisse à ses parents le matin de son exécution. Fils d'instituteurs, Henri Fertet est né le 27 octobre 1926 à Seloncourt dans le Doubs. Après des études primaires à Seloncourt où ses parents sont en poste, il entre en 1937 au Lycée Victor Hugo de Besançon.

Matricule Émile – 702...

Henri Fertet intègre, pendant les vacances de l'été 1942, un groupe de résistance dirigé par Marcel Simon, jeune secrétaire de la Jeunesse agricole chrétienne.

Henri Fertet participe à trois opérations durant l’année 1943, en février, constitué d'une trentaine de membres, le groupe intègre l'organisation des Franc-tireurs et Partisans (FTP) et devient le Groupe Guy Môcquet (en hommage au plus jeune des fusillés de Châteaubriant, en octobre 1941), qui s'organise rapidement dans la lutte clandestine.

Henri Fertet participe comme chef d'équipe à trois opérations. D'abord à l'attaque du poste de garde du Fort de Montfaucon, près de Besançon, le 16 avril 1943, pour s'emparer d'un dépôt d'explosifs.

 

Puis, le 7 mai, c’est la destruction d'un pylône à haute tension à Châteaufarine.

Enfin, le 12 juin 1943, sur la route entre Besançon et Quingey, il prend part à l'attaque d’un commissaire des douanes allemand dans le but de lui prendre son arme, son uniforme et les papiers qu'il transporte. Henri Fertet le blesse mortellement, mais l'arrivée d'une moto les empêche de se saisir des documents.

Images d'illustration

Images d'illustration

Arrestation et Procès

Activement recherchés, de nombreux membres du groupe sont arrêtés à partir de juin 1943. Les Allemands débarquent le 3 juillet 1943 chez les parents d’Henri Fertet, à Besançon.

Il est conduit en cellule à la prison de la Butte.

Jugé par un tribunal de guerre allemand, le 18 septembre 1943, il est le plus jeune des prévenus et est condamné à mort en même temps que 15 de ses 23 co-inculpés dont 7 autres seront déportés (3 reviendront).

 

Un condamné à mort de 16 ans,  Henri Fertet

Après 87 jours d'emprisonnement et de torture, Henri Fertet, âgé de 16 ans, est fusillé à la Citadelle de Besançon le 26 septembre 1943 avec 15 de ses camarades. Inhumé au cimetière de Saint-Ferjeux à Besançon, son corps a été exhumé et incinéré après la guerre. Ses cendres ont été dispersées avec celles de son père à Sermoyer dans l'Ain.

En 1947, Henri Fertet a été homologué dans le grade d'aspirant des Forces françaises de l'Intérieur à titre posthume : Chevalier de la Légion d'Honneur, Compagnon de la Libération - décret du 7 juillet 1945, Croix de Guerre 39/45, Médaille de la Résistance, Croix du Combattant Volontaire 39/45 et  Médaille des Déportés et Internés Résistants

Sa dernière lettre...

Dernière lettre d’Henri Fertet à ses parents, 26 septembre 1943

Chers Parents,
Ma lettre va vous causer une grande peine, mais je vous ai vus si pleins de courage que, je n'en doute pas, vous voudrez encore le garder, ne serait-ce que par amour pour moi.
Vous ne pouvez savoir ce que moralement j'ai souffert dans ma cellule, ce que j'ai souffert de ne plus vous voir, de ne plus sentir peser sur moi votre tendre sollicitude que de loin. Pendant ces 87 jours de cellule, votre amour m'a manqué plus que vos colis, et souvent je vous ai demandé de me pardonner le mal que je vous ai fait, tout le mal que je vous ai fait.
Vous ne pouvez vous douter de ce que je vous aime aujourd'hui car, avant, je vous aimais plutôt par routine, mais maintenant je comprends tout ce que vous avez fait pour moi et je crois être arrivé à l'amour filial véritable, au vrai amour filial. Peut-être après la guerre, un camarade vous parlera-t-il de moi, de cet amour que je lui ai communiqué. J'espère qu'il ne faillira pas à cette mission sacrée.
Remerciez toutes les personnes qui se sont intéressées à moi, et particulièrement nos plus proches parents et amis; dites-leur ma confiance en la France éternelle. Embrassez très fort mes grands parents, mes oncles, tantes et cousins, Henriette. Donnez une bonne poignée de main chez M. Duvernet; dites un petit mot à chacun. Dites à M. le Curé que je pense aussi particulièrement à lui et aux siens. Je remercie Monseigneur du grand honneur qu'il m'a fait, honneur dont, je crois, je me suis montré digne. Je salue aussi en tombant, mes camarades de lycée. A ce propos, Hennemann me doit un paquet de cigarettes, Jacquin mon livre sur les hommes préhistoriques. Rendez « Le Comte de Monte-Cristo » à Emourgeon, 3 chemin Français, derrière la gare. Donnez à Maurice André, de la Maltournée, 40 grammes de tabac que je lui dois.
Je lègue ma petite bibliothèque à Pierre, mes livres de classe à mon petit papa, mes collections à ma chère petite maman, mais qu'elle se méfie de la hache préhistorique et du fourreau d'épée gaulois.
Je meurs pour ma Patrie. Je veux une France libre et des Français heureux. Non pas une France orgueilleuse, première nation du monde, mais une France travailleuse, laborieuse et honnête. Que les français soient heureux, voila l'essentiel. Dans la vie, il faut savoir cueillir le bonheur.
Pour moi, ne vous faites pas de soucis. Je garde mon courage et ma belle humeur jusqu'au bout, et je chanterai « Sambre et Meuse » parce que c'est toi, ma chère petite maman, qui me l'as apprise.
Avec Pierre, soyez sévères et tendres. Vérifiez son travail et forcez-le à travailler. N'admettez pas de négligence. Il doit se montrer digne de moi. Sur trois enfants, il en reste un. Il doit réussir.
Les soldats viennent me chercher. Je hâte le pas. Mon écriture est peut-être tremblée; mais c'est parce que j'ai un petit crayon. Je n'ai pas peur de la mort; j'ai la conscience tellement tranquille.
Papa, je t'en supplie, prie. Songe que, si je meurs, c'est pour mon bien. Quelle mort sera plus honorable pour moi que celle-là ? Je meurs volontairement pour ma Patrie. Nous nous retrouverons tous les quatre, bientôt au Ciel. « Qu'est-ce que cent ans ? » Maman, rappelle-toi : « Et ces vengeurs auront de nouveaux défenseurs qui, après leur mort, auront des successeurs. »
Adieu, la mort m'appelle. Je ne veux ni bandeau, ni être attaché. Je vous embrasse tous. C'est dur quand même de mourir.
Mille baisers. Vive la France.
Un condamné à mort de 16 ans, H. Fertet
Excusez les fautes d'orthographe, pas le temps de relire.
Expéditeur : Henri Fertet Au Ciel, près de Dieu.

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