Jean Turmeau, jeune résistant, rennais, responsable F.T.P.F. de la Manche et l'adjoint au commandant Pétri, est fusillé au champ de tir, route de Baudre, à Saint-Lô, le 11 mai 1944. Il est une des 32 victimes des pelotons d’exécutions allemands qui sévirent dans le département de la Manche depuis le 12 avril 1941, condamné par le tribunal de la feldkommandantur 722, sous son nom de résistant Alfred Ottino.
Son engagement, il l’explique dans sa dernière lettre qui laisse à ses parents, pour le rétablissement de la liberté et la quête de justice, souhaitant se débarrasser le pays de l’occupant et revenir à la situation initiale, il veut une paix générale et la fin des nationalismes.
Jean Turmeau, étudiant en pharmacie à Quimperlé participe à plusieurs sabotages dès mars 1942, affilié à un groupe gaulliste à Brest. A partir de juin 1943, il se réfugie dans la Mayenne où il vit dans la clandestinité et intègre les Francs-Tireurs et Partisans Français (F.T.P.) combattant à Rennes en tant qu’adjoint départemental pour l’Ille-et-Vilaine Matricule 10 002. Il obtient le grade de lieutenant au mois d’août 1943, et sera homologué dans le grade de capitaine à dater du 1er février 1944, à titre posthume.
De 1942 et jusqu’en septembre 1943, Jean Turmeau participe à des sabotages ferroviaires en Ile-et-Violaine ; et il aussi, tente d’assassiner, le commissaire aux renseignements généraux pour la Bretagne, en villégiature dans le village de Romazy. Mais le piège est déjoué et il est arrêté le 3 septembre. Ecroué à la prison de la Prévalaye, il parvient à s’évader le 7 en descendant deux étages, accroché à la gouttière. Il se trouve obligé de vivre de nouveau dans la clandestinité en Mayenne.
Jean Turmeau motive dans une lettre « Testament » son engagement, sa motivation pour la résistance face à l’occupant, mais aussi l’attrait du risque, du danger bien au-delà de sa vie, la fraternité dans les F. T. P. F. : « Je n’ai pu résister à l’attrait qu’offrait cette vie d’aventure … je me suis retrouvé dans ce milieu magnifique que forment tous ces jeunes gens, ces hommes, ces femmes unis par le même idéal, quoique n’étant pas toujours du même parti. »
Mais encore une fois, c’est bien le combat pour la liberté qui sera au cœur de ses préoccupations : « je combats de nouveau et les allemands et surtout leur clique de collaborateurs qui nous a fait tant de mal à nous autres gens de gauche, libre penseur et autres dont l’idéal étaient la liberté de pensée et le bien-être du peuple ».
Ces parents ne connaissent pas son engagement dans la résistance, du fait de sa clandestinité et Jean y revient dans sa dernière lettre : « Je regrette de faire tout cela en cachette de vous sans en recevoir votre franche approbation car c’est souvent ce qui me manque et qui me manquera encore : cet appui moral que l’on trouve en famille. »
En novembre 1943, Jean Turmeau devient le responsable militaire départemental de la Manche de F. T. P. F., prenant la suite de Robert Colléatte, et va diriger le groupe « Charles Tillon » qui va conduire à plusieurs attentats mais pas seulement, la diffusion de tracts, la fabrication et distribution des faux papiers remis aux réfractaires du S.T.O. Entre décembre 1943 et février 1944, on a pu comptabiliser onze attentats que l’on peut attribuer au groupe « Charles Tillon ».
Jean Turmeau se rend fin janvier 1944, à Cherbourg et le 1er février 1944, il se fait arrêter à Flers, par la Police de Sûreté de Rouen (Police de Vichy). Il ne fait aucun doute que les policiers pétainistes savaient que l’individu qu’elle venait d’appréhender était le terroriste Alfred. Jean Turmeau est remis aux mains de la Gestapo quasi immédiatement. Est-ce que Jean Turmeau sous la torture a parlé ? Oui, Jean Turmeau a parlé, des documents l’ont prouvé mais sans jamais dénoncer ou trahir.
Après cela, il a été déféré au parquet de Domfront, placé sous mandat de dépôt pour activité terroriste le 2 février ; avant d’être transféré à Saint-Lô, dans le courant de février-mars 1944.
Jean Turmeau est traduit devant le tribunal militaire réuni sur décision du feldkommandant 722, le 10 mai et condamné à mort comme franc-tireur. Selon le récit de son codétenu à la prison de Saint-Lô, Jean Turmeau passe sa dernière nuit à chanter des refrains patriotiques. Le 11 mai 1944, il est extrait de la prison très tôt et il est fusillé, près de Saint-Lô dans un bois à la Barre de Semilly.
Sa dernière lettre de Jean Turmeau a été rédigée sur une feuille arrachée maladroitement d’un cahier de petit format (165 x 22 mm) ou il a écrit, au crayon de bois, l’annonce de la terrible nouvelle ; il veut laisser le souvenir d’un fils courageux et qui assume son engagement, ne condamnant personne et ne regrettant que la peine que sa disparition va procurer à sa famille. Il remercie son père et sa mère pour l’éducation qu’ils lui ont prodiguée et confie à sa petite soeur, Jeannine, la terrible mission de le remplacer auprès de leurs parents.
Dernière lettre de Jean Turmeau, à ses parents et sa soeur.