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Sébastien-Philippe LAURENS Journaliste et Historien

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Comme le disait Winston Churchill : “ La vérité est incontestable, la malveillance peut l’attaquer, l’ignorance peut s’en moquer, mais à la fin, elle demeure." ---------------------------- Et je rajouterai que la curiosité permet de la faire émerger. ------ Journaliste, Historien et Géo-politologue, passionné par l’Histoire, la Culture, et tant de choses… ------------------------------ Toute une passion, ce site est là pour le plaisir du partage... au plus grand nombre humblement par un regard sur le monde sans juger ou orienter... ---------------------------------------------------------- Alors venez à la découverte, soyez curieux... Et bonne lecture...


Lettres de Fusillés : Jean Turmeau, Résistant de 22 ans "en vrai Français qui sait pour quoi il a combattu"

Publié par Sébastien-Philippe LAURENS sur 13 Septembre 2019, 08:47am

Catégories : #Lettres de Fusillés, #Jean Turmeau, #Résistance, #Seconde Guerre Mondiale, #Histoire, #France, #@BlogLSP, #CeJourLà, #Esprit de défense

Lettres de Fusillés : Jean Turmeau, Résistant de 22 ans "en vrai Français qui sait pour quoi il a combattu"

Jean Turmeau, jeune résistant, rennais, responsable F.T.P.F. de la Manche et l'adjoint au commandant Pétri, est fusillé au champ de tir, route de Baudre, à Saint-Lô, le 11 mai 1944. Il est une des 32 victimes des pelotons d’exécutions allemands qui sévirent dans le département de la Manche depuis le 12 avril 1941, condamné par le tribunal de la feldkommandantur 722, sous son nom de résistant Alfred Ottino.

 

Son engagement, il l’explique dans sa dernière lettre qui laisse à ses parents, pour le rétablissement de la liberté et la quête de justice, souhaitant se débarrasser le pays de l’occupant et revenir à la situation initiale, il veut une paix générale et la fin des nationalismes.

Le parcours de résistant de Jean … Matricule : 10 002

Jean Turmeau, étudiant en pharmacie à Quimperlé participe à plusieurs sabotages dès mars 1942, affilié à un groupe gaulliste à Brest. A partir de juin 1943, il se réfugie dans la Mayenne où il vit dans la clandestinité et intègre les Francs-Tireurs et Partisans Français (F.T.P.) combattant à Rennes en tant qu’adjoint départemental pour l’Ille-et-Vilaine Matricule 10 002. Il obtient le grade de lieutenant au mois d’août 1943, et sera homologué dans le grade de capitaine à dater du 1er février 1944, à titre posthume.

 

De 1942 et jusqu’en septembre 1943, Jean Turmeau participe à des sabotages ferroviaires en Ile-et-Violaine ; et il aussi, tente d’assassiner, le commissaire aux renseignements généraux pour la Bretagne, en villégiature dans le village de Romazy. Mais le piège est déjoué et il est arrêté le 3 septembre. Ecroué à la prison de la Prévalaye, il parvient à s’évader le 7 en descendant deux étages, accroché à la gouttière. Il se trouve obligé de vivre de nouveau dans la clandestinité en Mayenne.

Jean Turmeau, son engagement résistant, pour la Liberté…

Jean Turmeau motive dans une lettre « Testament » son engagement, sa motivation pour la résistance face à l’occupant, mais aussi l’attrait du risque, du danger bien au-delà de sa vie, la fraternité dans les F. T. P. F. : « Je n’ai pu résister à l’attrait qu’offrait cette vie d’aventure … je me suis retrouvé dans ce milieu magnifique que forment tous ces jeunes gens, ces hommes, ces femmes unis par le même idéal, quoique n’étant pas toujours du même parti. »

Mais encore une fois, c’est bien le combat pour la liberté qui sera au cœur de ses préoccupations : « je combats de nouveau et les allemands et surtout leur clique de collaborateurs qui nous a fait tant de mal à nous autres gens de gauche, libre penseur et autres dont l’idéal étaient la liberté de pensée et le bien-être du peuple ».

Ces parents ne connaissent pas son engagement dans la résistance, du fait de sa clandestinité et Jean y revient dans sa dernière lettre : « Je regrette de faire tout cela en cachette de vous sans en recevoir votre franche approbation car c’est souvent ce qui me manque et qui me manquera encore : cet appui moral que l’on trouve en famille. »

 

Jean Turmeau, de résistant à héros mort pour la France

En novembre 1943, Jean Turmeau devient le responsable militaire départemental de la Manche de F. T. P. F., prenant la suite de Robert Colléatte, et va diriger le groupe « Charles Tillon » qui va conduire à plusieurs attentats mais pas seulement, la diffusion de tracts, la fabrication et distribution des faux papiers remis aux réfractaires du S.T.O. Entre décembre 1943 et février 1944, on a pu comptabiliser onze attentats que l’on peut attribuer au groupe « Charles Tillon ».

Jean Turmeau se rend fin janvier 1944, à Cherbourg et le 1er février 1944, il se fait arrêter à Flers, par la Police de Sûreté de Rouen (Police de Vichy). Il ne fait aucun doute que les policiers pétainistes savaient que l’individu qu’elle venait d’appréhender était le terroriste Alfred. Jean Turmeau est remis aux mains de la Gestapo quasi immédiatement. Est-ce que Jean Turmeau sous la torture a parlé ? Oui, Jean Turmeau a parlé, des documents l’ont prouvé mais sans jamais dénoncer ou trahir.

Après cela, il a été déféré au parquet de Domfront, placé sous mandat de dépôt pour activité terroriste le 2 février ; avant d’être transféré à Saint-Lô, dans le courant de février-mars 1944.

 Jean Turmeau est traduit devant le tribunal militaire réuni sur décision du feldkommandant 722, le 10 mai et condamné à mort comme franc-tireur. Selon le récit de son codétenu à la prison de Saint-Lô, Jean Turmeau passe sa dernière nuit à chanter des refrains patriotiques. Le 11 mai 1944, il est extrait de la prison très tôt et il est fusillé, près de Saint-Lô dans un bois à la Barre de Semilly.

Sa dernière lettre…

Sa dernière lettre de Jean Turmeau a été rédigée sur une feuille arrachée maladroitement d’un cahier de petit format (165 x 22 mm) ou il a écrit, au crayon de bois, l’annonce de la terrible nouvelle ; il veut laisser le souvenir d’un fils courageux et qui assume son engagement, ne condamnant personne et ne regrettant que la peine que sa disparition va procurer à sa famille. Il remercie son père et sa mère pour l’éducation qu’ils lui ont prodiguée et confie à sa petite soeur, Jeannine, la terrible mission de le remplacer auprès de leurs parents.

Dernière lettre de Jean Turmeau, à ses parents et sa soeur.

Ma chère maman, mon cher papa et chère petite Jeannine,
C’est une bien triste lettre que je vous envoie là. Il en effet fort probable que lorsque vous la recevrez je ne serai plus. J’ai en effet à la suite de mon arrestation par la Police Mobile de Rouen, à Flers été remis aux autorités allemandes à Flers, Alençon puis ici à Saint-Lô où je viens d’être condamné à mort à la suite de mon activité. La mort ne me fait pas peur, je l’avais un peu prévue, j’irai à elle la tête haute, en vrai Français qui sait pour quoi il a combattu. Ce n’est pas cela qui me fait de la peine, c’est de vous laisser là sans vous avoir revus ; c’est de penser à tous les soucis que j’ai été pour vous durant ces 21 ans là, à tout le mal que je vous ai donné et que c’est justement au moment où je pouvais espérer vous le payer qu’il me faut y renoncer ainsi qu’à tout le reste sur terre.
Enfin je ne me plains pas, j’ai eu une belle jeunesse, agréable, aisée, exempte de soucis. J’en ai bien
[2e page] profité. J’ai joui des plaisirs à volonté, la vie a toujours été assez clémente pour moi et je n’ai jamais eu ce que l’on peut appeler vraiment du mal. Aussi je vous en rends grâce de tout mon coeur, de toute mon âme. Comme je voudrais vous le dire, vous le prouver, vous embrasser, vous prendre sur ma poitrine, vous dire enfin tout ce que vous avez été pour moi et que mon caractère malheureusement peu expressif me prêtait peu à épencher (sic).
Ma petite Jeannine tâches de me remplacer auprès de Papa et Maman et aides les le plus possible toutes les fois qu’il le sera nécessaire. Je te donne ma bague que tu porteras et ma ceinture si je peux l’avoir. Ils te rappelleront ton frère et pourquoi il est mort et que tu dois toujours faire comme s’il était là en le remplaçant près de papa et maman. Vous donnerez mes adieux à toute la famille, j’en écrit pas plus ici faute de place. Pour mes affaires vous en disposerez que vous voudrez. Pour le reste mes camarades de prison vous donneront des détails. Vous irez voir Mme Jehan que vous embrasserez pour moi et vous ferez également mes adieux à Marie Louise.
P.S. : Je veux que rien dans la toilette marque ma fin.
Je vous embrasse de toute mon âme, de toute ma force mille fois. Je penserai à vous jusqu’à la fin.
Votre fils Jean.

 

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