En novembre 1960, quelques jours après son élection, le Président élu, John F. Kennedy prend connaissance d’un dossier en préparation pour le renversement du régime castriste, validé par le Président Eisenhower et son vice-président Richard Nixon. Ce plan implique une phase militaire contre l’île, menée par des Cubains anticastriste (formés et financés par la CIA), qui devait se transformer ensuite en guérilla au sein même de Cuba pour faire naître une nouvelle Révolution.
Le 17 avril 1961, 1500 anticastristes débarquent à Cuba, dans la baie des cochons. Les anticastristes sont mis en déroute, 118 hommes tués et 1200 capturés. Cette opération sera un fiasco pour les services de renseignements, endossé par le jeune président. Cuba devient alors un avant-poste des Soviétiques sur le continent américain.
A la suite d'un coup d'État qui lui permet d'évincer le président Carlos Prio Socarras, le général Fulgencio Batista s'empare à nouveau du pouvoir le 10 mars 1952. Il se proclame président et suspend la constitution. Alors, un jeune avocat Fidel Alejandro Castro Ruz attaque Batista en Justice, l’accusant d’avoir violé la Constitution, mais sa demande est jugée irrecevable. Le 26 juillet 1953, Fidel organise, en réaction l’attaque de la Caserne Moncada, mais c’est un total fiasco, il y perd 80 partisans et il est arrêté et condamné à 15 ans de prison. C'est à cette occasion qu'il rédige « L'Histoire m'acquittera », discours passionné défendant son action et explicitant ses thèses politiques.
Batista voit son mandat renouvelé en 1954, après des élections truquées et il établit dès lors sa dictature. Fidel Castro est amnistié au début de l’année 1955, il s’exile d’abord au Mexique, puis aux Etats-Unis avec son frère Raúl Castro, d'où il réorganise la résistance à Batista, c’est ce que l’on appellera « le mouvement du 26 juillet ». Le 2 décembre 1956, il rentre clandestinement à Cuba, avec 82 autres exilés dont son frère Raùl et Che Guevara, sur le navire de plaisance « Granma » dans la Province Orientale (au sud-est de Cuba) mais l'armée de Batista les attendait ; et après quelques jours de combats, seuls 12 des 82 hommes engagés ont survécu en se réfugiant dans la Sierra Maestra d'où ils mèneront une guérilla.
Le 24 mai 1958, Batista envoie dix-sept bataillons (plus de 10 000 hommes) contre Castro lors de l'Opération Verano, mais le Gouvernement des États-Unis, gêné par la brutalité du régime de Batista, retire l'aide militaire américaine qu'il lui apportait et commence à voir en Castro une alternative à Batista. Au cours de la contre-offensive de l'automne 1958, les forces révolutionnaires de Castro prennent Santiago de Cuba, la deuxième ville du pays, et Santa Clara. Et le 31 décembre 1958, alors que la situation est très incertaine, le président Batista fuit le pays avec 40 millions de dollars vers la République Dominicaine, puis l'Espagne de Franco. Castro entre en vainqueur dans la Capitale de Cuba, La Havane, le 8 janvier 1959 et se voit nommer Premier Ministre. Le 16 janvier 1959, Fidel Castro gagne les élections... en les truquant. Le gouvernement américain ferme les yeux, le nouveau dirigeant est même reçu aux Etats-Unis par le Vice-président Richard Nixon. À son retour, pour contre la puissance américaine, Fidel Castro dénonce l'ingérence économique des Etats-Unis et ne voit qu’une seule alternative se lier à l’Union Soviétique et au Parti communiste.
Lors des débats télévisés, John Kennedy avait reproché à l'administration républicaine de ne pas être assez ferme devant l'arrogance du dictateur cubain. Le candidat Nixon était resté muet, pourquoi ? Car Richard Nixon, Vice-président et candidat à la présidence, et le Président Eisenhower, en réponse à l’affront de Castro, étaient parfaitement informés d'une opération militaire contre le régime de Fidel Castro.
Suite à la visite de Fidel Castro, Nixon expliqua que le dirigeant cubain était naïf, mais pas forcément communiste. Il n’est alors qu’un réformateur humaniste et explique : « Le capitalisme sacrifie l’homme… Le communisme sacrifie les droits de l’Homme. » Le gouvernement américain d’Eisenhower, en août 1960, approuve un budget de 13 millions, pour financer cette tentative de révolution. La CIA, avec à sa tête Allen Dulles, a la charge de préparer l’opération dans le plus grand secret.
Mais les médias américains ont vent de l’opération en préparation et le 7 avril 1961, le New York Times fait était de 5000 ou 6000 hommes qui seraient bientôt débarqués sur le territoire cubains. Le président Kennedy est vert de rage, en le découvrant et déclare à ces conseillers : « Je n’en crois pas mes yeux ! Il me suffit d’ouvrir mon journal et de lire pour savoir ce qui se prépare. Castro n’a même pas besoin d’envoyer ses agents ! »
Un débarquement, mais un fiasco annoncé…
Le président Kennedy donne son aval à la mission de la Brigade 2506, le 5 avril 1961. Le matin du samedi 15 avril, six bombardiers B 26 peints aux couleurs cubaines, venus du Nicaragua, attaquent les bases aériennes de La Havane et de Santiago (sud). Cinq appareils de l'aviation castriste - une quinzaine d'avions en tout - sont détruits au sol. Mais neuf appareils qui avaient été dissimulés en prévision de ce bombardement restent intacts et joueront un rôle décisif 48 heures après. Le 16 avril, lors de l'enterrement des sept victimes des bombardements, Fidel Castro, après avoir comparé le débarquement à l'attaque sur Pearl Harbor, lance : « Ce que les impérialistes ne peuvent nous pardonner, c'est d'avoir fait triompher une révolution socialiste juste sous le nez des États-Unis ». La CIA pense que le débarquement va provoquer un soulèvement contre le régime de Castro, mais il n’en est rien car de façon à empêcher la population de se rallier aux exilés qui débarquent, les forces castristes raflent et parquent sous la menace des armes plus de 200 000 personnes, dont toute la population non communiste proche de la zone de débarquement et des dizaines de milliers de personnes à la Havane, dans des lieux publics fermés, notamment les stades, les casernes, les cours d'école et les théâtres.
Le lendemain, le 17 avril vers 01 h 15, la brigade 2506, débarque en deux points, à Playa Larga et Playa Girón, soit au fond et à l'entrée orientale de la Baie des Cochons, à moins de 200 km au sud-est de La Havane. Au large, huit cargos sont destinés à consolider la tête de pont. Mais les restes de l'aviation de Castro décollent. Le Houston, touché par des roquettes s'échoue et le bataillon qu'il transporte ne pourra jamais débarquer. Le Rio Escondido, chargé de 10 jours de munitions, est coulé. Les autres reprennent le large. Le Président Kennedy reçoit des nouvelles, heure par heure et elles ne sont pas bonnes du tout. Dans le ciel, les T 33 de Castro abattent deux B 26, quatre pilotes américains sont tués. Au sol, l'effet de surprise du débarquement est quasi-nul : l'invasion était « un secret de Polichinelle », dira le ministre cubain de l'Intérieur de l'époque, Ramiro Valdes, et les chars et les miliciens castristes sont sur le pied de guerre et ne donnent aucun répit aux rebelles. Une cellule de crise est réunie en urgence et e secret à la Maison Blanche, cette réunion dura toute la nuit, et a pour but principal de savoir le devenir des rebelles avec deux solutions, un soutien militaire apparent américain, ou une neutralité de façade.
A Quatre heures du matin le 18 Avril 1961, la décision est prise, il n’y aura pas d’autres couvertures aériennes, ni de marines envoyés en renfort pour détruire les forces militaires de Castro, les rebelles traverseront les 100 kilomètres nécessaires pour rejoindre les maquis anticastristes réfugiés dans les montagnes, d’après les calculs de la CIA, plus du quart de la population cubaine les soutiendront. Mais sur le terrain, c’est très différent, les combats, acharnés, dureront deux jours, jusqu'au 19 avril ; et privés de soutien aérien et du matériel lourd, les « mercenaires » jettent l'éponge : 1.189 prisonniers, 161 morts dans les rangs castristes, 107 dans les rangs anticastristes.
Le 27 avril 1961, John F. Kennedy fait une déclaration, à la Maison-Blanche : « Un sage a dit un jour que l’erreur ne devient une faute que si l’on refuse de la corriger. Nous assumerons nos erreurs. » Ce message est clair, il reconnaît ses erreurs d’appréciation dans l’Affaire de la Baie des Cochons, mais aussi le fait des erreurs et voir mensonges de l’ancienne administration ainsi que de la manipulation de la CIA, dont il a été la victime. Cette opération est un échec sur bien des plans, pour le gouvernement de Kennedy, une des explications est l’absence de tout effet de surprise, la CIA a eu vent que le gouvernement soviétique été informé de l’opération sur Cuba. Le directeur de la CIA, Allen Dulles, croyait, pouvoir forcer la main sur le Président. L’échec de l’opération a mis l’occupant du Bureau ovale dans une colère rare qui souhait « répandre les cendres de la CIA aux quatre vents » et cela coûtera son poste au directeur de la CIA. De plus, le président Kennedy n'a jamais eu confiance en ses chefs militaires, car il se méfiait de leurs préjugés et de leurs analyses quant à l'attitude de l’Amérique vis-à-vis du reste du monde.
L’échec de l’invasion de la baie des cochons représente une humiliation pour l’administration de Kennedy et tout intervention militaire à Cuba était désormais proscrite et cela a poussé le gouvernement cubain à rechercher des garanties de sécurité auprès de l'URSS et cela conduira à une crise bien plus importante avec Cuba en octobre 1962 ; ainsi qu'une aggravation des relations entre les deux blocs. Enfin, en dépit de l’échec de cette mission, la volonté de renverser Castro restera. La question de la libération des prisonniers va être un enjeu de négociation pour le gouvernement américain et cela aboutira en décembre 1962, contre des médicaments et des vivres pour une valeur de 53 millions de dollars.